Supernaturels - 2003

La salle de bain - Lyon

supernaturel - Texte de Maxime Matray édité à l'occasion de l'exposition.



Le Rocher
Mousse polyester, peinture latex / Polyester foam, latex paint
225 x 200 x 200 cm

Elastica
Bandes de latex, fils de nylon, élastomère, caoutchouc et plastique, mousquetons /
Strips of latex, nylon line, elastomer, rubber and plastic, snap hooks
260 x 440 x 310 cm

Supernaturel
En regardant la nature proche dans notre confort quotidien, on distingue toujours quelque chose de sensible et d'inénarrable en terme d'expérience. À la recherche des corps qui parleraient de ces arbres, clairières, mousses ou pierres et du désir que l'on a de les adopter, l'environnement supernaturel prend pour cible le comportement individuel et distrait à l'égard de la nature pour en dégager quelques objets. Fort du besoin de se raconter des histoires pour expérimenter notre environnement à portée de main (évocation d'Indiana Jones, de David Hamilton ou du Petit Poucet), mais sans s'accommoder d'une trame narrative pour se construire, les deux objets supernaturel développés à présent n'illustrent pas et ne se ressemblent pas. Elastica et Le rocher ont en commun de proposer une forme à l'appui de ces gestes intermédiaires peu définissables par une action et peu prémédités par l'acteur, bien que dans ce laps ceux-ci soient signifiants.

Le rocher
En regardant la nature proche dans notre confort quotidien, on évalue facilement l'intérêt qu'on lui porte : lieu de retrait temporaire, reposoir mystère ou accoudoir forêt, une multitude de formes se soumettent à notre personne en attente, dans l'éveil, le guet, les moments de pause. Vu de ce point, le sentiment de protection n'a que faire de la croissance de la végétation. L'instant qui nous préoccupe fige les éléments de son environnement. Quelques souvenirs romanesques transparaissent : une pierre qui parle, un rocher gardien de tous les secrets que des amoureux se sont dit en son creux, un monolithe sacré et, toujours un petit coin où le minéral poli par le temps est plus doux au toucher qu'ailleurs lorsqu'il supporte un corps assoupi. Toute ressemblance est donc fortuite, lorsque émerge un rocher noir et souple pour s'appuyer. Mesurant plus de deux mètres de haut, ce que son diamètre atteint quasiment à la base, Le Rocher est en mousse polyester taillée et recouverte d'une peinture noir bleutée à base de latex. Le volume offre la place pour se blottir car ses parois sont dessinées pour placer son dos dans, glisser son bras sur, poser sa hanche contre. Une montagne derrière soi protège, en mémoire, la prise d'un vent glacial. On tourne autour dominé par son sommet, on s'y installe, on ne peut pas vraiment s'y cogner.

Elastica
En regardant la nature proche dans notre confort quotidien, on s'approprie facilement les courbes qu'elle développe pour s'intégrer dans un espace construit : les liens qui soutiennent une plante grimpant sur un mur, le filet d'espèces végétales se formant comme un rideau sur le bord d'un chemin, les lianes qui s'entremêlent en tombant des arbres pour que le tarzan qui nous habite, fatigué d'échapper aux animaux de la jungle urbaine, s'y agrippe le temps d'un bâillement. Le design d'Elastica prolonge nos membres supérieurs de quelques mailles extensibles spécialement disposées : un enchevêtrement de fils et de bandes élastiques nouées s'attachent aux murs de l'espace dans lequel il se déploie. L'objet, troué des vides où les nœuds ne se font pas, permet à la main et au bras de s'y glisser en souplesse. Le tout s'étire, se tripote plus ou moins consciemment et le corps s'appuie verticalement, retenu par les mailles souples de ce filet coloré à l'instar d'une toile d'araignée géante ou d'un tricot architectural.